J’ai donné en avril et mai des cours à des L1 « Info-Com » de l’IMUS. Comment suis-je tombé si bas en suis-je arrivé là me direz-vous? Eh ben personne n’a été capable de me le dire. Comme je vous le narrais dans un billet précédent, je pense que c’est un des effets secondaires de l’opération « Empruntez Gaël », je ne vois pas d’autre explication.
J’ai reçu un jour un coup de fil, et on me demandait mes préférences de salle/horaires pour mes cours, censés commencer 3 semaines plus tard… C’était comme ça, j’étais inscrit sur les maquettes, 100h de cours à assurer/assumer… Intéressé par le challenge (faire le malin derrière un écran ça je sais faire, devant 40 étudiants avides de savoir et de connaissance je n’avais jamais essayé), j’ai donné mon accord pour 50h, réparties en 5 séances de 2h, pour 5 groupes de 40 étudiants (en fait je n’ai pu assurer que 30h). Et sur quoi me demandait-on d’intervenir? « Logiques de l’argumentation », rien de moins. Bien qu’étant hyper compétent en « logiques de l’argumentation », j’ai averti mon interlocutrice que moi mon truc c’était plutôt la docélec. On s’est mis d’accord sur un programme, (carte blanche, ça m’allait bien comme programme) et un calendrier. Je leur ai donc parlé de l’ « environnement documentaire à l’Université » (ressources documentaires, catalogues, site Web), fait un peu de « recherche documentaire » (les bases théoriques) et on a fini par un cours/débat sur Google, avec une petite dose de RSS.
Résultat des courses?
Expérience très intéressante, rien de tel que d’être confronté à « son public » pour se retrouver en face de vérités pas toujours agréables à entendre…
Des exemples? « Vous connaissez notre catalogue/site Web? –Non, y’a Google« , « Bon alors, la recherche documentaire… –Mais M’sieur, y’a Google« , « M’sieur, pourquoi vous mettez SCD et pas BU sur votre site Web?« , « M’sieur, c’est vous qui avez choisi les couleurs? [cf. charte graphique de l’Université…] » « M’sieur, pourquoi on doit chercher dans plein de trucs différents, parce qu’avec Google au moins…?« , « M’sieur, la BU on dirait un CDI« , j’en passe et des meilleures.
Pas mal d’éléments sur lesquels on doit réfléchir, s’il n’est pas trop tard, je pense là à notre catalogue de BU vs Google, à notre présence en ligne. Bien qu’il n’y ait point de salut pour eux en dehors de Google (vous vous êtes déjà retrouvé face à 30 MacBook et leurs pommes allumées, avec derrière, 30 étudiants qui vérifient en « live » la véracité de vos propos?) ils ne savent rien du géant de Mountain View, et plus largement rien des outils qu’ils pratiquent quotidiennement. Et je dirai même plus, ils s’en f******. J’exagère, j’ai eu droit à quelques envolées à l’évocation de la pub ciblée (avec démos en direct, on ne fait pas plus efficace), ou encore en évoquant les fameuses conditions d’usage de Facebook, qu’aucun d’entre eux ne connaissait. Là aussi, certains se sont vite plongés derrière leurs écrans.
Au final, je me dis qu’on doit les former à nos ressources évidemment, mais aussi (et surtout?) à cet environnement numérique dont ils usent et abusent, mais qu’ils ne connaissent pas.
Quant à savoir comment je me suis débrouillé en tant que « prof », à en juger par les « je le kiffe ce prof, déçu de ne pas l’avoir eu toute l’année! » (vu sur le mur Facebook d’un de « mes » étudiants) et autres « M’sieur vous voudriez pas aussi faire prof d’anglais et d’histoire des arts?« , je me dis que je ne les ai pas trop dégoûtés (bon ça c’était avant que je leur donne leurs notes…)
Quoi qu’il en soit, il se pourrait qu’ils me revoient, puisque je vais sans doute signer pour une saison supplémentaire…
photo : Mad Professor Forest Green Compressor | terekhova
Bonjour Gaël,
Quelques questions en passant:
Quel était le programme exactement ?
Quel était le rapport théorique/pratique ?
Comment les as-tu évalués ?
Quels outils pédagogiques as-tu utilisés ?
Comptes-tu partager tes supports de cours ?
Quelle a été la réaction de la/du responsable de la formation des usagers quand elle/il a appris que tu lui appris tes nouvelles responsabilités ?
Merci,
@MxSz :
— le programme, c’est moi qui l’ai choisi, en tenant compte de ce que je pensais qu’il serait utile de présenter aux étudiants en matière de recherche doc (une sorte de « passage obligé »), mais également de ce sur quoi j’avais envie de discuter avec eux (Google, Facebook, et comment ils « vivent ça »).
— Ce n’était que de la théorie, même si presque chacun étant équipé d’un ordinateur, certains vérifiaient en « live » ce que je racontais.
— L’évaluation s’est déroulée en deux temps. Un devoir de contrôle continu, et une épreuve lors des partiels. Le devoir de contrôle continu portait sur les cours. Ce qui m’intéressait, c’était de voir ce qu’ils avaient retenu, et s’ils faisaient preuve d’un peu de bon sens. Pour ce devoir, les questions étaient donc toutes affichées à l’écran, et ils trouvaient les réponses par un jeu de questions-réponses avec moi. Pour le partiel, les questions étaient à peu près les mêmes (ils en avaient été informés avant), la seule différence c’est que je n’étais pas là (ils en avaient aussi été informés 😉
— J’ai utilisé quelques slides, fait quelques démos sur le Web, rien d’original. Pas prévu de diffuser mes supports, sans doute ceux de l’année prochaine, que j’aurai plus de temps pour fignoler.
— Pas de réaction sur cette expérience.
Bonjour Gaël,
J’ai également assuré quelques cours dans l’école d’ingé où je suis responsable documentation au départ juste pour présenter notre catalogue et la façon de faire une « ébauche » de recherche documentaire. Même constat de mon côté, également sur la recherche papier (les élèves ne faisaient pas la différence entre une monographie, un périodique, un article…) et puis de toute façon « y a Google ». Cela dit l’expérience est transformée car face à cela nous avons décidé de développer un peu ce module, je vais donc assurer un peu plus d’heure, de ce fait les réponses au questions de MxSz m’intéressent également!
Merci pour ce blog!!
Pauline
@Pauline :
Je vais aussi développer un peu ce cours l’année prochaine (je suis supposé assurer 140h de cours…), n’hésitez pas à faire part de vos retours (ici ou ailleurs).
voilà en direct ce qu’on attend des « bibliothécaires » d’aujourd’hui : education informationnelle, questions sur les outils et pratiques. Rigolo de voir tous les débats d’une part, et ce qui se passe de l’autre. Je me retrouve également à faire des cours à des étudiants, et de plus en plus, mais j’aurai titré le billet : B.I.B (enfin D.O.C. dans mon cas 😉
@Willy
J’ai surtout eu l’impression qu’on cherchait à les occuper ces étudiants, qu’il fallait combler un trou dans l’emploi du temps, et que c’est tombé sur moi. Tant mieux pour moi, et j’espère pour eux, ça m’intéressait.
Mais c’est vrai que c’est marrant de voir comment eux, nos usagers, nous perçoivent (quand ils savent qu’on existe…)
Quant au titre du billet, ok, mea culpa, je me suis planté
@gael le trou dans l’emploi du temps c’est fort possible. Toutefois un besoin d’education informationnelle se fait de plus en plus en sentir et les bibs/docs/profdoc ne sont pas les plus mal positionnés pour faire grimper ces competences. Et puis c’est tombé sur toi par qu’il faut bien un peu de sex-appeal dans ces cours un peu pénibles parfois :).
Sur ce, bonnes vacances à toi entre mer et montagne si tu en as la chance.
@Willy : Oui, mais ce besoin n’avait pas été pris en compte avant qu’on me demande d’intervenir, c’est moi qui ai décidé de bosser là-dessus avec les étudiants. Et effectivement nous ne sommes pas trop mal placés pour traiter de ces questions, mais à part nous, qui le sait?
Quant au sex-appeal… 😉
Bonnes vacances, entre terrils et terrils? 😉